Article original
Évaluation d'une procédure antalgique associant protoxyde d'azote et crème EMLA lors des injections de toxine botulique chez l'enfantEvaluation of analgesic protocol with nitrous oxide and EMLA cream during botulinum toxin injections in children

https://doi.org/10.1016/j.annrmp.2007.02.003Get rights and content

Résumé

Objectifs

Évaluer l'efficacité et la tolérance de l'analgésie par le protoxyde d'azote au cours des injections de toxine botulique dans le traitement de la spasticité focale chez l'enfant.

Méthode

Étude prospective incluant 40 enfants, pour la plupart infirmes moteurs cérébraux (IMC), âgés de 2 à 17 ans et ayant reçu des injections de toxine botulique. Dix enfants étaient polyhandicapés. Le traitement concernait souvent plusieurs muscles, avec plusieurs injections par muscle. Le nombre total d'injections variait de 1 à 25. La procédure associait une anesthésie locale par crème EMLA et l'inhalation d'un mélange équimolaire de protoxyde d'azote et d'oxygène (MEOPA). Les manifestations douloureuses étaient évaluées par l'équipe (un médecin, un interne, une infirmière et une auxiliaire puéricultrice) comme présentes ou absentes, et directement reliées à l'injection ou non.

Résultats

Quarante-cinq pour cent des patients n'ont présenté aucune manifestation douloureuse. Trente pour cent ont présenté des manifestations cliniques paraissant directement liées aux injections. Pour 25 %, il existait des manifestations non spécifiques et globalement imputables à de l'anxiété et de l'inconfort. Des effets secondaires modérés et réversibles ont été notés chez trois patients.

Discussion

L'efficacité du MEOPA a été démontrée, à la fois sur la douleur et l'anxiété. Toutefois, on constate que son effet est insuffisant chez la moitié des patients inclus dans cette étude, et demande à reconsidérer ce protocole dans certains cas. L'évaluation précise de la douleur aiguë est difficile chez l'enfant avec un déficit cognitif. Les manifestations cliniques évocatrices de douleur peuvent aussi s'intégrer à de l'anxiété et à du stress.

Abstract

Aims

To evaluate the efficiency and tolerance of analgesic treatment with nitrous oxide and topical eutectic mixture of local anesthetics (EMLA) in children undergoing botulinum toxin injections for focal spasticity.

Methods

Prospective study including 40 consecutive patients aged 2 to 17 years, most with cerebral palsy, undergoing botulinum toxin injections. Ten had severe cerebral palsy with cognitive deficiency. For most patients the treatment involved several muscles, with several injections per muscle. The total number of injections varied from 1 to 25. The procedure was performed with topical anesthesia with EMLA and inhalation of nitrous oxide (50% nitrous oxide, 50% oxygen). Reactions were recorded by the staff (a practician, a nurse, an auxiliary staff member and an internist) and whether they related to the injection or were nonspecific.

Results

A total of 45% of patients showed no clinical manifestation of pain; for 30%, reactions were crying and withdrawal directly related to the injections; and for 25%, manifestations seemed nonspecific and mainly related to overall anxiety and discomfort. In 3 patients, moderate side effects were observed (visual hallucinations and euphoria).

Discussion

Nitrous oxide analgesic with topical EMLA was efficient for children undergoing botulinum toxin injections but remained insufficient for half of our patients, and modification of the protocol is needed in some cases. Precise evaluation of acute pain is difficult in children with major cognitive deficits. Clinical manifestations are related to pain but also to overall anxiety and stress.

Introduction

Les injections de toxine botulique sont de plus en plus répandues dans le cadre de la prise en charge symptomatique de la spasticité focale de l'enfant atteint d'infirmité motrice cérébrale (IMC), élargissant souvent l'autorisation de mise sur le marché (AMM) de leur utilisation. Cette AMM est en effet restreinte au traitement de la déformation dynamique du pied en équin chez les enfants de plus de deux ans présentant une spasticité due à une infirmité motrice cérébrale. Plusieurs revues de la littérature récentes témoignent de la fréquence de ces injections [3], mais aucun consensus sur les doses, les techniques et l'analgésie de cet acte invasif n'a été clairement défini [2], [13], [15]. La spasticité du membre inférieur est, de loin, la plus large indication et fait l'objet de la plupart des études, visant le plus souvent à l'amélioration fonctionnelle de la marche chez l'IMC di- ou hémiplégique. Les muscles du membre supérieur sont, en comparaison, assez peu injectés, en raison d'un effet souvent moins satisfaisant. D'autres indications, plus rares, telles que l'hypersialorrhée [14], la paralysie obstétricale du plexus brachial, l'achalasie [11] ont été également répertoriées.

La prise en charge de la douleur aiguë de l'enfant d'un mois à 15 ans a fait l'objet d'une recommandation par l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (Anaes) en 2000 [17]. Ce document présente, entre autres, les différentes échelles d'évaluation disponibles en fonction de l'âge et du type de douleur. L'Anaes rappelle également les moyens antalgiques à disposition et propose des stratégies de prise en charge pour divers actes douloureux ou en postopératoire de certaines interventions. Pour les injections de toxine botulique, il n'a cependant pas été établi de protocole spécifique, et des travaux restent nécessaires pour déterminer les procédures optimales.

Le mélange équimolaire d'oxygène et de protoxyde d'azote (MEOPA) est couramment employé pour la prise en charge de la douleur aiguë provoquée lors de soins ou de procédures douloureuses [1], [4], [12], [18], pour son action à la fois analgésique, anxiolytique, légèrement amnésiante et peu sédative. Il est plus ou moins associé à une anesthésie de surface.

Les injections de toxine botulique, désormais effectuées en pratique courante ambulatoire, sont réalisées dans la plupart des cas avec le MEOPA. On constate toutefois une hétérogénéité des pratiques d'un centre à l'autre, allant de l'anesthésie de surface seule jusqu'à l'anesthésie générale, parfois appliquée de façon systématique dans certains centres [2]. Notre expérience est celle d'une utilisation systématique de MEOPA, associée à une anesthésie de surface par patch d'EMLA. L'objectif de cette étude prospective non contrôlée est d'analyser l'efficacité et la tolérance de cette stratégie antalgique chez l'enfant lors du traitement d'une spasticité focale par toxine botulique.

Section snippets

Patients et méthodes

Quarante enfants (18 filles, 22 garçons), âgés de 2 à 17 ans, ont été inclus dans cette étude.

Les injections de toxine botulique étaient réalisées au cours d'une hospitalisation de jour, dans le service de rééducation fonctionnelle infantile (SRFI) de l'hôpital d'enfants de Saint-Denis de La Réunion, entre décembre 2004 et juin 2005.

Une consultation avait posé au préalable l'indication du ou des muscles à injecter, avec une première explication sur le déroulement de la procédure. Étaient exclus

Résultats

Sur les 40 enfants inclus, 17 (42,5 %) avaient un âge compris entre cinq et dix ans.

La spasticité était, pour 38 enfants, en rapport avec une IMC, avec un tableau clinique de diplégie spastique (12), d'hémiplégie (9), de tri-(1) ou tétraplégie (7), et dix patients (25 % de notre population) avaient une forme sévère avec atteinte cognitive (polyhandicap ou encore infirmité motrice d'origine cérébrale [IMOC]). Deux enfants présentaient une spasticité en rapport respectivement avec un accident

Discussion

L'utilisation du MEOPA s'est considérablement répandue depuis plusieurs années, en pratique ambulatoire notamment. En effet, il s'agit d'un outil présentant de nombreux avantages puisqu'il a non seulement une action analgésique mais également anxiolytique et sédative, tout en préservant le réflexe laryngé (et ne nécessitant donc pas la présence d'un anesthésiste). Il possède des propriétés physiques uniques : délai d'action rapide, période de récupération brève aussitôt l'inhalation stoppée. Ces

Conclusion

L'évaluation de la douleur dans la pratique des injections de toxine botulique est difficile chez l'enfant, de surcroît avec un handicap sévère, et les échelles actuellement disponibles ne sont pas toujours adaptées.

Par ailleurs, le contrôle de la douleur n'est pas toujours satisfaisant sous couvert de l'association MEOPA et anesthésie de surface, surtout lorsque le nombre de sites musculaires injectés devient important. En outre, les enfants IMC sont amenés à recevoir de manière répétée des

Références (18)

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Cited by (14)

  • Tolerance of salivary gland botulinum toxin A injection under local anesthesia for the treatment of sialorrhea in children: An observational study

    2022, European Annals of Otorhinolaryngology, Head and Neck Diseases
    Citation Excerpt :

    EMLA is known to be locally effective, but the success rate is not known and efficacy factors are difficult to assess, although success is related to type of procedure, application time and anxiety [18]. The efficacy of associating cutaneous analgesia to nitrous oxide sedation varies according to number and type of procedure [19,20]. Collado et al., in a review of the literature, found adverse effects of nitrous oxide in 1 in 1,000 cases, most often concerning nausea and vomiting [21]; they highlighted the fact that the patient is conscious and therefore needs accompanying for analgesia to be effective [21].

  • Do clowns attenuate pain and anxiety undergoing botulinum toxin injections in children?

    2020, Annals of Physical and Rehabilitation Medicine
    Citation Excerpt :

    The maximal FLACC score in the present study was lower than that found in previous studies of pain during BTI with usual distraction [6,13,33–35]. Moreover, in our study, fewer than 30% of the children had a maximal FLACC score > 3 as compared with 50% of participants in previous studies [13,35]. In contrast to previous studies [20,21], in our study, clown distraction may not have reduced pain more than usual distraction because pain ratings were already relatively low.

  • Determining the technical and clinical factors associated with pain for children undergoing botulinum toxin injections under nitrous oxide and anesthetic cream

    2011, European Journal of Paediatric Neurology
    Citation Excerpt :

    This difference could be explained with the specific population we included, i.e. newly injected children. Fewer children with cognitive impairment were also included in our population than in other studies.7,8 The distribution of the CHEOPS scores around the extremities of the possible scores (4–5 and 12–13) raises questions with regard to the sensitivity of this scale or to its validity for evaluating pain during BoNT injection which is a long, painful act.

  • Botulinum toxin injection pain relief using a topical anesthetic skin refrigerant

    2010, Journal of Plastic, Reconstructive and Aesthetic Surgery
    Citation Excerpt :

    Alleviating these deterrents to treatment may therefore be an attractive option. A number of authors have demonstrated significant pain relief from botulinum toxin A injections using topical anesthetic creams such as EMLA.6,7,9,10,14 The efficacy of pain relief associated with EMLA application is directly related to time of application.

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